Space Boy : Olivier Pairoux, la tête dans les étoiles

Pour son premier long-métrage Space Boy, Olivier Pairoux a choisi de tourner un film de genre, familial, « dans l’inspiration des Goonies, des grands films des années 80 que je regardais quand j'étais petit ». Ce film d’enfants et de rêves, sorti en salles le 27 octobre 2021, est déjà couronné de cinq prix à l’international. Intarissable, passionné, ce réalisateur belge sorti de l’IAD et formé à l’école de la télé revient sur son parcours et son intérêt pour la conquête spatiale.

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Photos : Kwassa Films (DR)
Un article de Rémy Rucquoi, Thibault Delroisse, Doriane Heylighen, Leana Putzolu (bac3)

Pour son premier long-métrage Space Boy, Olivier Pairoux a choisi de tourner un film de genre, familial, « dans l’inspiration des Goonies, des grands films des années 80 que je regardais quand j’étais petit ». Ce film d’enfants et de rêves, sorti en salles le 27 octobre 2021, est déjà couronné de cinq prix à l’international. Intarissable, passionné, ce réalisateur belge sorti de l’IAD et formé à l’école de la télé revient sur son parcours et son intérêt pour la conquête spatiale.

Photos : Kwassa Films (DR)
Un article de Rémy Rucquoi, Thibault Delroisse, Doriane Heylighen, Leana Putzolu (bac3)

Sortir son premier film à 44 ans, cela peut sembler tardif. Mais avant de goûter aux salles obscures, Olivier Pairoux n’a pas chômé… Il a passé toute sa carrière derrière la caméra. Après avoir étudié à l’IAD, il démarre d’abord à la RTBF avant de traverser “l’autoroute” et d’atterrir chez RTL-TVI où il co-crée notamment PLUG RTL. Il réalise aujourd’hui la quasi-totalité des jingles des chaînes du groupe RTL Belgique. Il a aussi sa propre chaine YouTube traitant d’écriture télévisuelle et de dramaturgie, créée en plein confinement.

Inspiré depuis son plus jeune âge par le cinéma d’auteur de Woody Allen ou Lars Von Trier, il ne se cache jamais d’avoir de multiples sources d’inspiration pour faire ses œuvres. «Je pense que c’est important d’avoir des modèles. Ca n’empêche pas, par la suite, d’être sincère et honnête». L’envie d’écrire des films le taraude, des années durant. « Mais, pour cela, il faut être armé« , s’explique-t-il, “Il faut avoir une certaine expérience qui n’est pas qu’artistique. C’est connaître des gens, savoir gérer les gens… Au-delà de l’artistique, c’est aussi technique. Je savais que mon expérience à la télé allait être un excellent écolage ».

Olivier Pairoux (DR)

A force de créer des identités visuelles, d’imaginer des décors, de concrétiser ses délires au quotidien sur les chaînes d’RTL, le réalisateur touche-à-tout a pu affiner son imaginaire. Cela se retrouve dans le film Space Boy, qu’il a conçu de A à Z.

Synopsis : 1986, Jim (Basile Grunberger) est un jeune garçon un peu “space” qui a la tête dans les étoiles (au propre comme au figuré). Lorsqu’il apprend que son papa astronaute abandonne sa prochaine mission, il décide de lui prouver qu’il faut toujours aller  au bout de ses rêves. Pour le concours scientifique de son école, il décide de réaliser une montgolfière avec l’aide précieuse de sa camarade Emma (Albane Masson).

Un condensé de difficultés

Empli de sincérité, Olivier Pairoux se laisse guider, avant tout, par ses idées et ses envies. Pour son premier film, il brave deux difficultés majeures : Space Boy est un film d’époque ayant pour protagonistes des enfants. “Je ne savais même pas que ça allait être compliqué puisque je suis un peu naïf. C’est après qu’on m’a dit ‘Ouais attends, un film d’époque avec des gosses et des animaux, c’est compliqué !’». L’exercice, semé d’embûches, est réussi par l’enthousiasme. Sortir un film familial qui ne soit pas un film d’animation, c’est rare dans le cinéma belge. Le film de genre fait peur. “Je pense qu’aujourd’hui, il y a quelque chose de plus segmentant dans le cinéma. C’est-à-dire qu’on fait un cinéma plutôt ‘de niche’. Le cinéma est très ciblé. À un moment donné, tu as juste envie de faire le film que tu as envie de voir. C’est aussi con que ça, tu te dis ‘Mais qu’est-ce que j’ai envie de voir, qu’est-ce que j’irai bien voir au cinéma ?’ Et j’irais bien voir Space Boy !”

Le réalisateur voulait créer une forme d’universalité dans son film. Avec des lieux de tournage se trouvant à la fois en Belgique et en Hollande. L’histoire se devait d’être non géolocalisée… mais pas intemporelle ! Les mélodies nous rappellent la musique électro des synthétiseurs analogiques de 86.

Image extraite du film Space Boy, Kwassa films (DR)

Sans refaire les Goonies, en garder l’essence

Si l’action du film se déroule dans les années 80, c’est pour deux raisons principales. “D’un côté, c’est effectivement un hommage, une référence à mes classiques d’enfance, comme les Goonies. De l’autre côté, c’est par honnêteté par rapport au propos. J’ai grandi dans les années 80 et il y avait un état d’esprit, une liberté qu’on a perdu dans les années 90 avec les affaires Dutroux et autres. On partait avec nos BMX des journées entières. Nos parents s’en foutaient ». Inspiré par son vécu, Olivier Pairoux crée cette atmosphère à la fois old-school et fantastique. “Je vais chercher des références que j’aime, des trucs qui me font vibrer, qui me parlent et qui parlent au film.”

Il n’hésite pas à faire “du Tim Burton” en jouant avec l’espace, en quittant le réalisme dans ses décors. « Par exemple, tu vas voir une petite maison, et puis quand tu es à l’intérieur, c’est gigantesque. Dans un autre décor, celui de l’Observatoire de l’espace, j’ai aussi voulu donner ce sentiment. Jamais la pièce ne rentrerait dans le bâtiment. Et on s’en fout ! Ce qui est drôle, c’est de se laisser porter par l’imagination ».

Une histoire d’amitié, de fidélité

Le cinéma, pour Olivier Pairoux, c’est aussi et surtout un travail humain avec des rencontres et des amitiés. Depuis des années, bien avant l’aventure Plug-RTL, le réalisateur entretient une relation particulière avec Eusebio Larrea, co-scénariste du film et producteur chez RTL-TVI. “Eusebio gère toute ma vie professionnelle et ma femme gère l’autre moitié” rit-il. « C’est une question compliquée la relation avec Eusebio, c’est mon brother.”

De l’univers de la télévision, Olivier Pairoux a conservé une certaine proximité avec les gens. “On est arrivés avec notre expérience TV assez bon enfant et décomplexée. Tout contents d’être là  pour tourner une fiction, donc assez détendus. J’ai voulu transmettre sur ce plateau cet esprit télé où chacun est solidaire et aide l’autre. En télévision, si tu pars avec un caméraman, tu vas l’aider à porter son matériel par exemple. Avoir une certaine approche communiste du projet ». Sur le tournage, pas de cases ; tout le monde s’entraide. Le réalisateur porte les décors. Le co-scénariste gère les enfants. C’est exactement cet esprit solidaire qui soude l’amitié des deux hommes.

D’ailleurs lorsqu’on lui demande s’il est prêt à se lancer dans une production à gros budget, voire à partir à Hollywood, le réalisateur hésite. Car Space Boy a été fait avec un budget honorable. Pour lui, au-delà du budget, l’important c’est d’être entouré des bonnes personnes pour réaliser un bon film. “La production trouve aussi sa valeur, pour moi, dans l’amitié et dans l’amour des collaborateurs ».

Marketing n’est pas un vilain mot

Eusebio gère aussi l’aspect marketing qui fait parfois défaut dans les projets de cinéma belge. Olivier aime les marques et les idées créatives. Il adore créer des logos et monter un projet sur une base promotionnelle, primordiale selon lui. « Il y a plein de films belges qui sortent au cinéma, dont personne n’entend parler et qui sont peut-être très bons. Donc, il y a un problème. Si on prend l’exemple des K3 à Anvers, elles ont leurs shows télévisés, elles remplissent des grandes salles… Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, tout le monde sait que les K3 existent. Il faut arriver à faire exister les choses parce que c’est bien beau de donner de l’argent au cinéma pour produire des films, mais si après il n’y a pas de moyens pour les promouvoir, pour les faire connaître, ça ne sert à rien. C’est aussi là qu’Eusebio a joué un rôle important. »

Une invitation à prendre de la hauteur

Space Boy met en scène deux familles aux types d’éducation très distincts. L’une est très stricte et l’autre plus libre. Olivier Pairoux nous explique ne pas vouloir transmettre un message, mais poser des questions : « Quand tu es parent, tu te poses la question : ‘Est-ce que je protège mon enfant ou est-ce que je le laisse se casser la figure ?’ On retrouve ce dilemme dans le film avec Graham et Jim d’un côté et Emma et sa mère de l’autre. Il y a deux systèmes d’éducation qui s’opposent, mais qui vont se compléter. Ce qui est aussi intéressant, c’est que parfois ce sont les enfants qui changent les parents, c’est ce que j’ai voulu montrer. Ma mère est psy. A la maison, on ne regardait pas la télé, on se racontait notre journée…”

Image extraite du film Space Boy, Kwassa films (DR)

Passion spatiale

Dans son précédent court-métrage, Puzzle, la conquête spatiale faisait déjà partie du scénario. Lorsque Belga lui commande un jingle pour ouvrir ses films, il imagine un petit garçon qui regarde les étoiles avec une caméra old-school. Avec Space Boy, Olivier Pairoux donne à nouveau une place de choix à la voie lactée. “Ça me vient de ma maman, on regardait les étoiles filantes au mois d’août, elle me faisait lire Hubert Reeves, elle était fan d’Haroun Tazieff. J’ai baigné dans cet attrait scientifique ». L’histoire de Space Boy s’inspire du grand saut de Joseph Kittinger, qui a sauté de 31 300 mètres en 1960 depuis un ballon. « Je l’ai découvert dans le clip de Dayvan Cowboy du groupe Boards of Canada. Je ne connaissais pas cette histoire. Quand j’ai vu les images de Kittinger sauter en 1960, je me suis dit ‘mais quel équilibre entre cette folie et cette intelligence’. C’est les Jackass avec le cerveau de Stephen Hawking !”. Le réalisateur assure toutefois que dans son prochain long métrage, un film noir (scoop), il ne sera plus question de l’espace.

Space Boy, en salles depuis le 27 octobre.

Un article de Rémy Rucquoi, Thibault Delroisse, Doriane Heylighen, Leana Putzolu (bac3)

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