Partant d’une partie de l’Histoire dont on parle peu, le dessinateur Aurel conte la relation entre Josep, caricaturiste espagnol, et Serge, gendarme français.
Photo du film « Josep » d’Aurel
Février 1939, Barcelone tombe. Cinq cent mille réfugiés fuient l’Espagne pour trouver un abri en France. Ce qui les attend : des camps de concentration.
« De quel côté ils étaient, les animaux ? On se le demande. De quel côté ? »
Citation de Serge extraite de « Josep »
Le film d’animation « Josep », présenté au FIFF, montre l’atrocité des camps, tous ces espagnols parqués comme des animaux. L’humiliation et la violence latente pavent le scénario et assoient un contexte de peur. La mentalité des années trente est complexe et durement représentée. Mais elle est réelle. Des gendarmes français ouvertement racistes, ouvertement discriminants, ouvertement sexistes. Sauf Serge.
« Je faisais ce qu’un gendarme français devait faire. Pas toujours de belles choses. Je n’aimais pas ce que je faisais mais je le faisais quand même. Quelques fois, on devait prêter main forte à ceux de la Gestapo. Jusqu’à quel point doit-on obéir à un ordre ? »
Citation de Serge, extraite de « Josep »
Deux récits se mêlent tout au long du film. Celui de Serge et Josep, évidemment. Mais aussi celui de Serge et de Valentin, son petit-fils, des années plus tard. Une transmission familiale d’un pan de vie dont on devine qu’il a été rarement narré. Pourtant, la présence de Josep est omniprésente dans la chambre de ce grand-père mourant. Josep est là. Josep est partout. Sur les murs, dans les cadres, sur les abat-jours. Comment se fait-il alors que la propre fille de Serge ne semble pas connaître l’importance de cette relation ?
« Toi, tu te réfugiais derrière des traits, tu restes loin de ton sujet, tu fais des caricatures car ce que tu as vu et que tu gardes en mémoire, ça te fait peur. Le jour où enfin tu accepteras la couleur, c’est que tu auras apprivoisé ta peur. »
Citation de Frida Kahlo, extraite de « Josep »
Les dessins d’Aurel se mêlent à ceux de Josep. Les premiers sont bruts, épurés. Ils laissent la place à l’émotion pure. Rien n’est superflu. Les décors s’effacent, rendant leur titre aux personnages et à l’histoire. Les dessins s’enchaînent sans transition, l’animation occupe une place minime. C’est un genre que l’on n’a pas l’habitude de voir qui défile devant nos yeux.
Les deuxièmes sont criants d’une souffrance profonde. On se perd dans les détails de scènes hurlantes. Tout est noir. Tout est blanc. Pas une once de couleur, elle ne viendra que plus tard sous l’impulsion de Frida Kahlo. Les personnages, eux, ne sont pas épargnés. Rien n’est fait pour les adoucir. Des bouches crasseuses accompagnent des regards gras.
« Josep » vient directement toucher le spectateur dans son intimité.
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