Hare krishna, au coeur des Ardennes

À quelques pas de Durbuy, le château de Petite Somme abrite depuis 1979 la communauté spirituelle de Radhadesh, adoratrice de Krishna. Alliant spiritualité et tourisme, les dévots ont dû apprendre à vivre leur foi entourés de visiteurs.

par

Photo : Audrey Forman (CC BY NC ND)

À quelques pas de Durbuy, le château de Petite Somme abrite depuis 1979 la communauté spirituelle de Radhadesh, adoratrice de Krishna. Alliant spiritualité et tourisme, les dévots ont dû apprendre à vivre leur foi entourés de visiteurs.

Photo : Audrey Forman (CC BY NC ND)

Le long d’une route bordée de verdure, deux imposantes colonnes de pierres entre lesquelles se hissent de grandes lettres dorées indiquent l’entrée du château de Petite Somme. C’est dans cette bâtisse du 19ème siècle que s’est établie la communauté Radhadesh, en 1979. Une petite centaine de dévots y résident toute l’année, bercés par le mode de vie particulier qu’impose le Mouvement international pour la Conscience de Krishna (ISKCON). Le mouvement ISKCON appartient au Vaishnavisme, branche importante de l’Hindouisme. Les Vaishnavas sont dévots de Krishna.

Derrière le portail, les passants les plus curieux peuvent déjà distinguer des profils singuliers pour la région. Hommes et femmes, vêtus ou non de l’habit traditionnel hindou, discutent et partagent un repas dans le jardin. Non loin d’eux, un doux parfum sucré se dégageant de la petite boulangerie éveille les sens. Dressé dans le hall du château, les bras longeant son habit blanc et le front orné de la marque de Vishnu, Martin Gurvich attend le second groupe de visiteurs de la journée. 

Martin Gurvich, membre et guide touristique de Radhadesh
Photo : Audrey Forman (CC BY NC SA)

Martin, le guide du jour, est lui-même membre du mouvement et en assure la direction européenne depuis 1982. Il est également directeur exécutif du Forum Hindou de Belgique et directeur de la fondation Museum of Sacred Art. Enfant d’une mère juive et d’un père catholique, rien ne prédestinait l’uruguayen à rejoindre la communauté de Krishna. C’est pourtant au sein du château des Ardennes belges qu’il trouva sa voie intérieure quelques années plus tard. Selon lui, « Radhadesh est un endroit qui combine différentes identités : c’est à la fois très touristique et très spirituel ». 

Un maitre spirituel 

En 1966, Srila Prabhupada, un sage indien de 69 ans, fonde le mouvement ISKCON et consacre sa vie à enseigner la conscience de Krishna à travers le monde. Pour les adeptes, aussi appelés les « Hare Krishna », il est une véritable incarnation du dieu sous forme de dévot, et de ce fait un modèle suprême de sagesse. Rien d’étonnant donc si au cours de la visite, plusieurs statues le symbolisant apparaissent aux yeux des visiteurs. 

Dans la salle du temple Gopinath, situé dans l’aile gauche du château, ceux-ci découvrent également un autel sur lequel siègent des poupées aux couleurs vives incarnant les dieux. Six fois par jour, les adeptes y déposent de la nourriture en guise d’offrande. 

Les dévots de Krishna, issus principalement de la région d’Anvers, répondent à une série de services tout au long de la journée. Dès 4h30 du matin commence le chant collectif des membres, suivi du mantra personnel qui dure environ deux heures. Ensuite, débute une conférence sur les textes sacrés. Au cours de la journée, chaque fidèle doit réciter le nom du dieu « Krishna » au sein du « maha-mantra » afin de se purifier l’esprit. Chacun peut réaliser ce procédé des centaines de fois sur une même journée. 

Le Kirtan ou chant du mantra de Krishna est un chant très important pour les dévots qui le chantent tous les jours. Photo : Audrey Forman (CC BY NC SA)

Hormis ces cérémonies, les membres du château pratiquent le yoga, entretiennent les jardins, cuisinent, prient ou assurent la gestion des différents lieux du domaine. Si certains dévots vivent toute l’année dans le château, des dizaines d’autres, provenants des villages voisins, viennent y pratiquer leur spiritualité de temps à autre. 

Dons, objets souvenirs et réductions 

Bien qu’il soit plongé dans un univers spirituel, difficile pour le visiteur de faire abstraction de l’aspect touristique de l’endroit. Un restaurant proposant un repas végétarien à 15 euros, une boutique aux articles soldés, des visites guidées payantes, une boulangerie, un musée, des demandes de dons… Ce phénomène, Martin l’explique tout naturellement : « La source principale de nos revenus est le tourisme, suivi des différents dons et subsides. Mais cela a diminué. Au départ, le tourisme représentait 80% de nos revenus. Maintenant, c’est plutôt entre 50 et 60% ». Ainsi, le domaine accueille 30 à 40 000 visiteurs par an, venus des quatre coins d’Europe. Ceux-ci, moyennant le prix de la visite, peuvent librement assister aux différentes cérémonies des dévots, voire même loger dans l’auberge du château, pour les plus enthousiastes. 

Selon Martin, cet engouement touristique n’est pas un problème au bon fonctionnement de la communauté : « Dans notre religion, le partage, la prédication est quelque chose de très important. Ici, c’est un partage. Au lieu d’aller vers les gens, ce sont les gens qui viennent à nous et qui partagent notre spiritualité ». 

Depuis l’ouverture du domaine, près de 800 000 personnes ont eu l’occasion de rencontrer la communauté spirituelle de Radhadesh. Une rencontre que certains jugent parfois étrange, voire sectaire, chose que Martin regrette : « On ne cherche pas à convertir les gens. Nous sommes contents si les gens apprennent quelque chose et améliorent leurs vies. » 

Nouveau sur Mammouth

Bigh : cultiver l'espoir d'une économie locale
Maraîchage bobo ou logements sociaux ?
4 ans après l’arrivée du virus, qui sont ceux que l’on appelle covid long ? 
Mon Fils, Xavier et moi