Pro League : zone de transit du football européen

La Belgique, pépinière de talents au service des grands championnats.

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Crédit photo: Hugo Barthélemy

La Belgique, pépinière de talents au service des grands championnats.

Crédit photo: Hugo Barthélemy

Alors qu’historiquement les clubs belges recrutaient pour améliorer leurs effectifs, ils misent depuis une dizaine d’années sur la revente de talents pour engendrer des bénéfices. Une tendance qui se confirme avec près de 300 départs vers les cinq grands championnats européens depuis la saison 2000/2001. Mammouth a analysé le marché des transferts de ces 25 dernières années.

Après sa défaite en coupe de Belgique et étant déjà mathématiquement hors course pour le titre en championnat, une nouvelle saison blanche s’annonce pour le club d’Anderlecht. Néanmoins, les futurs mercatos pourraient redonner le sourire aux dirigeants mauve et blanc. A défaut de performer sur le plan sportif, ils pourraient engranger des résultats financiers.

Le club le plus titré du championnat belge compte parmi les plus gros vendeurs de talents de Belgique. Depuis l’an 2000, 46 joueurs ont quitté le Sporting d’Anderlecht pour rejoindre la Ligue 1 (France), la Liga (Espagne), La Serie A (Italie), la Premier League (Angleterre) ou la Bundesliga (Allemagne). Cette tendance se retrouve dans toutes les grandes écuries belges. Elle leur permet aujourd’hui de suivre les exigences financières infernales imposées par les géants du football européen, pour pouvoir rivaliser dans les différentes compétitions européennes.

La Ligue 1 en tête de proue

Le championnat belge devient de plus en plus attractif : actuellement huitième au classement UEFA, la Belgique a doublé son coefficient UEFA par saison par rapport à 2022. Cette hausse du niveau de jeu en Pro League s’observe sur les terrains mais elle se voit également dans les transferts : sur les 299 transferts opérés vers les cinq grands championnats au 21e siècle, 100 ont été effectués ces cinq dernières années.

La Ligue 1 demeure le championnat qui s’intéresse le plus aux joueurs de Pro League. Lille, le Stade de Reims et le FC Nantes ont particulièrement les yeux rivés sur les pelouses belges. Ce trio est suivi de près par cinq autres clubs français qui comptent cinq joueurs ou plus issus du championnat belge sur les 25 dernières années. Les proximités géographique et linguistique facilitent les rapports entre les joueurs et clubs des deux pays, au même titre que leur place sur l’échiquier européen du football. La Ligue 1, elle-même considérée comme tremplin vers les plus grands clubs européens, fait souvent office d’intermédiaire entre la Belgique et les quatre autres compétitions majeures du Vieux Continent.

La raffinerie du football européen

La première division belge constitue une voie d’accès idéale vers les championnats plus prestigieux, notamment en raison de la qualité de la formation au plat pays. “La Pro League est un championnat d’un bon niveau qui reste accessible aux jeunes talents et aux profils non-aguerris, notamment grâce au savoir-faire des centres de formations belges”, commente Raffaele Poli, directeur et responsable football du Centre International d’Étude du Sport (CIES). L’explosion des ventes à l’international s’explique surtout par un changement du modèle économique des clubs belges qui ont opté pour un modèle de « plus-value« . Avant les années 2010, lorsqu’un club belge achetait un joueur, il pensait surtout à son rendement en championnat et non à son potentiel de revente. Bruges illustre précisément ce changement de mentalité : le club flandrien a triplé son nombre de ventes vers les cinq grands championnats en dix ans.

Les nouvelles technologies qui façonnent le recrutement moderne contribuent à la mise en lumière des joueurs du championnat belge mais aussi à l’émergence de championnats plus confidentiels. “Avant, un agent de joueurs envoyait des compilations d’actions de matchs de ses joueurs aux grands clubs. Aujourd’hui, avec des plateformes comme Transfermarkt ou Wyscout, toutes les statistiques et vidéos sont disponibles en ligne. Les clubs des cinq grands championnats peuvent plus facilement recruter dans des championnats moins connus”, explique Bart Tamsyn, responsable de la zone Belgique et Pays-Bas pour le site Transfermarkt.

Les clubs belges investissent désormais dans des infrastructures et du personnel afin de capitaliser rapidement sur la (re)vente de talents. Une source au sein d’un grand club belge, qui a préféré conservé l’anonymat, confirme cette stratégie qui consiste à acheter de jeunes joueurs à faibles prix dans l’espoir d’une plus-value économique future.

Baser son modèle économique sur la réalisation de plus-value relève d’une stratégie à double tranchant.

Raffaelle Poli, directeur et responsable football du CIES

Même si les performances sont bonnes, “baser son modèle économique sur la réalisation de plus-value relève d’une stratégie à double tranchant, prévient Raffaele Poli . Les ventes systématiques de joueurs entraînent des changements d’effectifs réguliers, ce qui complexifie la création d’une stabilité”.

Malgré les risques encourus, les écuries belges semblent privilégier cette stratégie pour briller sur la scène européenne, qui est rythmée par des dépenses d’argent toujours plus importantes au fil des saisons. Pour l’instant, les calculs s’avèrent payants : la compétitivité de la Pro League s’améliore au même titre que les finances des clubs. Reste à voir si ce modèle résistera à l’épreuve du temps.

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