Il fallait se lever tôt le jeudi 17 novembre pour ne pas rater l’entrée du sapin sur la Grand-Place. C’est au petit matin que ce mastodonte fait son entrée, avec son escorte policière.
Photo : Elodie Leroy (CC BY NC SA)
Cette année, le conifère est un Nordmann qui vient de la province de Liège. Il mesure 18 mètres, pèse plus de cinq tonnes et était planté dans le jardin d’une maison privée de Raeren, depuis 40 ans environ.
Le calme avant la tempête
Dans la nuit noire, un calme plat se fait ressentir sur la Grand-Place. On n’entend que le bruit de la pluie contre les pavés. Il est 5h30 et toutes les caméras sont prêtes pour ne rien rater de l’entrée du sapin sur la Grand-Place. Son arrivée est prévue pour six heures. Quelques minutes avant, la Grand-Place s’agite ; l’excitation monte pour les quelques curieux présents sur place. Au loin, on aperçoit les gyrophares de son escorte policière, les quatre motos le précèdent. Le camion le transportant fait son entrée à l’heure pile. Son imposante grandeur se fait déjà ressentir alors qu’il est encore couché sur le camion transporteur.
Une fois le camion à l’arrêt, il se retrouve vite encerclé par les médias et par les curieux qui veulent être les premiers à le voir trôner sur la plus belle place du monde. Les compliments fusent ; le sapin fait l’unanimité : il est magnifique. Avant de pouvoir le soulever et le placer dans le trou prévu à cet effet il faudra une bonne heure et demie.
Le ballet des grues
Avant de pouvoir soulever le sapin, il faut d’abord enlever les branches trop basses. Il faut également trouver l’endroit ou accrocher le crochet de la grue. Un des bûcherons plonge dans le sapin pour trouver la bonne sangle. Il émerge conquérant. Le sapin est bien accroché et est prêt à être soulevé.
Mais pas tout de suite. Il y a un court moment de latence en attendant l’équipe qui va pomper l’eau. Avec le temps qu’il fait, il vaut mieux vider le trou pour éviter que l’eau ne ressorte sous les cinq tonnes du conifère. Une fois cette opération terminée, le signal est lancé. On peut soulever le sapin.
Commence alors le ballet de deux grues, une chorégraphie longuement répétée par les grutiers et les bûcherons pour redresser le Nordmann. « Soulève, soulève, encore, stop ! » Le sapin restera en élévation un moment, le temps de lui tailler la mine. La tronçonneuse vrombit et d’un œil expert le bûcheron vient affiner le tronc du conifère. Il lui faudra une vingtaine de minutes pour que le tronc soit au diamètre de l’emplacement qui doit l’accueillir. À l’aide d’un repère il affine, encore et encore, un petit peu à gauche, puis à droite et encore à gauche. Une fois le tronc à la bonne taille, on peut commencer la manœuvre pour baisser l’arbre.
À l’aide des bûcherons qui vont aiguiller le grutier, le conifère prend place dans son socle au pied de l’hôtel de ville. Une étape périlleuse tant pour les bûcherons et le grutier que pour les spectateurs qui, en tentant d’avoir les plus belles photos de la manœuvre, ont pu inspecter les épines de très, très près.
Et CRAC
L’arbre trône dans son socle depuis quelques minutes quand un bruit assourdissant se fait entendre. La Grand-Place se fige. Tout le monde retient sa respiration ; plus personne n’ose bouger. Les bûcherons au sol font signe au grutier d’arrêter, de ne surtout pas lâcher les manettes et de ne plus bouger. Au bout de quelques secondes, quelqu’un rompt le silence « een tak is gebroken », une branche est cassée.
On vérifie le tronc. Il n’est pas cassé, oh soulagement ; les dégâts ne sont pas trop importants. Puis de l’inquiétude parce qu’il faut aller vérifier que rien d’autre ne risque de se casser au niveau de cette branche. Les bûcherons s’agitent. L’un d’eux s’équipe. Il enfile un harnais et est prêt à monter dans la nacelle pour grimper au niveau de la branche cassée. Un autre le retient, il veut aller trop vite, on ne trouve pas la bonne sangle pour l’attacher. On cherche dans un camion, puis un deuxième et enfin la bonne sangle est trouvée.
Après avoir inspecté le haut de l’arbre, là où la branche cassée se trouve, les bûcherons sont optimistes : « le reste semble solide« . Une fois la solidité vérifiée, les bûcherons peuvent s’atteler à combler le trou avec des planches en bois.
Bouquet final
Un petit peu avant huit heures, le jour commence à se lever et le sapin de Raeren trône, sain et sauf, sur la Grand-Place de Bruxelles. La place retrouve son calme pour un court instant, les touristes commencent à arriver. La surprise se lit sur leur visage lorsqu’ils aperçoivent le sapin. Puis un questionnement, va-t-il rester dépourvu de décoration ? Non ! Les planches en bois vont être recouvertes de copeaux par des ouvriers de la ville de Bruxelles. Une société va venir installer deux kilomètres de guirlande LED, de quoi l’observer depuis l’espace. On va également le décorer de 600 boules de couleur champagne. Un arbre tout en sobriété, selon les organisateurs.