Lutte 2.0 contre le VIH

Rencontre avec Stephen Barris afin de faire le point sur ces nouveaux outils qui ont transformé le paysage du VIH. 

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Photo: Thibault DEJACE

Rencontre avec Stephen Barris afin de faire le point sur ces nouveaux outils qui ont transformé le paysage du VIH. 

Photo: Thibault DEJACE

En l’espace d’une quinzaine d’années, le paysage entourant le VIH s’est considérablement métamorphosé. Alors que l’on mourait encore de ce virus début des années 2000, l’apparition de nouveaux outils et de nouvelles connaissances a permis aux porteurs du VIH de cohabiter avec celui-ci. Historiquement focalisée sur la lutte contre le VIH, l’association Ex-Aequo a décidé d’élargir son champ d’action à l’ensemble du domaine de la santé, et ce pour les HSH, entendez les « hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ».

Le premier décembre était la journée mondiale de lutte contre le VIH. En Belgique, où en est cette lutte? 

Alors, en Belgique, on remarque quand même que le nombre de contaminations par an diminue. Certes timidement, mais il diminue. Par contre, et c’est notre petite victoire, on voit que les HSH se protègent plus et sont beaucoup plus conscientisés que les populations hétérosexuelles. Il y a encore pas mal de boulot, notamment du côté des populations venant d’Afrique subsaharienne ou du côté des travailleurs du sexe, mais on progresse.

Quelles sont les discriminations les plus courantes auxquelles Ex-Aequo fait face concernant le VIH/SIDA ? 

Déjà, il faut faire la différence entre le VIH et le SIDA. Les gens cohabitent avec le VIH. Alors que le SIDA, c’est vraiment la maladie en tant que telle.  Le VIH cause une immunodéficience, rendant le système immunitaire de la personne atteinte plus sensible aux maladies opportunes (rhumes, grippes etc.). Lorsque ces maladies prennent le dessus, car le système immunitaire a été rendu trop faible par le VIH, le porteur est dit malade du SIDA, même si en réalité, il souffre d’autres maux.

Pour ce qui est des discriminations les plus courantes, il y a déjà la discrimination au sein même de la communauté gay. Les gens continuent de vivre avec des représentations de la maladie qui sont très morbides. Il y a encore une peur, très présente dans la communauté, d’avoir des rapports sexuels ou juste intimes avec une personne vivant avec le VIH. Plus généralement, les discriminations sortent de la sphère de l’intime et peuvent toucher le milieu professionnel, social ou même financier. Les personnes porteuses du VIH peuvent avoir des difficultés à obtenir un prêt par exemple.

« Le sida a, au moins, eu cet effet positif de faire parler de sexualité et de donner une visibilité à des populations, à des vies, à des amours, qui étaient ignorés. »

Stephen Barris, coordinateur chez Ex-Aequo.

Est-ce que les campagnes de prévention ont évolué ? 

Oui, clairement. Les campagnes en ce moment cherchent surtout à expliquer et à rendre lisible ce que l’on appelle la prévention combinée. La prévention combinée, ça signifie qu’on ne se concentre plus seulement sur le préservatif agrémenté d’un lubrifiant soluble à l’eau ou sur le dépistage. On met plutôt en avant un ensemble de nouveaux savoirs, de nouveaux outils à utiliser afin d’adopter moins de comportements à risque. Parmi ces nouveaux savoirs et outils se trouve l’arrivée de la biotechnologie. 

Justement, en quoi consistent ces biotechnologies ? 

La première biotechnologie à avoir vraiment changé les choses, c’est le traitement post-exposition, ou TPE. Ce traitement de 28 jours permet à toute personne ayant eu un rapport à risques d’éviter une contamination au VIH. Cependant, ce traitement est à prendre au plus vite, à l’hôpital dans les 48h idéalement, et il ne protège pas des autres IST.

La seconde biotechnologie qui a aussi pas mal révolutionné les pratiques, c’est la PREP, ou traitement préexposition. Ce traitement pris avant un rapport à risque permet d’éviter de contracter le VIH également. Il peut être pris en continu ou « à la demande », c’est-à-dire en prévision d’un rapport sexuel à risque. Comme le TPE, ce traitement ne protège que du VIH et non pas des autres IST. 

Que ce soit l’apparition du statut indétectable (= intransmissible) de la PREP ou de la TPE, cet ensemble d’outils a réellement révolutionné la façon d’envisager le VIH. Cependant, il paraît peut-être judicieux de signaler que la prise de la PREP ou de TPE impose un suivi médical et un contrôle aux IST et VIH régulier. De plus, la PREP n’est pas disponible pour tous. En effet, il existe une liste de critères pour déterminer si une personne peut bénéficier de ce traitement ou non (HSH ayant des rapports sexuels dits « à risques », ayant eu un épisode d’IST ou ayant pris le TPE au cours de ces douze derniers mois, usant de drogues lors de rapport). L’idée n’est donc pas de remplacer le préservatif par ces nouveaux outils mais d’informer sur leur existence. Car rappelons-le, le préservatif reste le seul moyen de se protéger tant du VIH que des autres IST.

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