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Le 5 avril dernier, la princesse Claire enfilait des gants de boxe dans une salle de sport bruxelloise. La scène est inhabituelle et révélatrice de l’évolution de la monarchie belge qui, depuis plusieurs années, multiplie les apparitions sur le terrain, mêlant soutiens symboliques, engagements sociaux et représentations protocolaires. Ces activités traduisent une volonté de maintenir un lien avec la population et d’affirmer une influence qui dépasse les fonctions purement cérémonielles. Nous avons analysé l’ensemble de ses activités officielles pour mieux comprendre son rôle, parfois discret.
Gants de boxe enfilés et tenue de sport sur le dos, la princesse Claire s’est initiée aux sports de combat et au basket le 5 avril dernier. Une discipline qu’elle appréhendait selon Soirmag, mais qu’elle a pu découvrir dans le cadre d’une visite à l’association bruxelloise Sport2Be, qui utilise le sport comme levier d’inclusion sociale et professionnelle pour les jeunes issus de milieux défavorisés.
Pas de traitement de faveur, ni de protocole particulier pour la Princesse, d’après Arthur Parmentier, chargé de marketing et de communication au sein de l’association. La sécurité a encadré le déplacement, mais une fois sur place, la Princesse a pris part aux activités sportives dans des conditions similaires aux autres participants. Pour l’association, soutenue par la Fondation Reine Paola, cette visite royale a constitué une opportunité de valoriser son action et de sensibiliser davantage le public à sa cause.
Ce rapport royal au public a mis du temps à se construire. Le mouvement s’est amorcé avec le roi Albert Ier en 1909, qui a gagné en popularité dès son mariage avec la reine Élisabeth, à une époque où les reines étaient encore tenues à l’écart de la scène publique. « Avant lui, on ne voyait quasiment jamais la famille royale en dehors des portraits officiels« , explique l’historien retraité de l‘Université de Liège et spécialiste en affaires royales, Francis Balace. Les premiers clichés du couple royal se vendaient alors comme des petits pains. « Peu à peu, l’image de la monarchie s’est transformée en véritable marque. Vous aviez leurs têtes sur les packagings de chocolats, sur les canevas de couture, et même sur des boîtes de cornichons. La famille royale apparaissait sur toute sorte de produits. » Une manière habile de créer du lien et de nourrir l’attachement populaire.
Depuis, le rôle de la famille royale a évolué. Ce changement se remarque notamment à travers le nombre d’évènements officiels qui semble être en constante évolution. En 2024, 291 sorties et activités royales ont été dénombrées.
Une forte influence sur la diplomatie économique
Le roi Philipe, avec un agenda ponctué de visites, d’audiences et de réceptions, s’impose sans surprise comme le membre le plus actif de la famille royale. La reine Mathilde suit le souverain de près, fidèle à ses engagements sociaux et éducatifs. Ensemble, ils forment un binôme solide, mais c’est chacun de leur côté qu’ils cumulent le plus d’activités. Le couple royal ferme ainsi la marche du podium.
Aujourd’hui, la monarchie belge conserve une certaine influence, notamment à l’international. « Le Roi et sa famille ont un rôle à jouer sur notre politique extérieure, en particulier sur la diplomatie économique« , précise Raoul Delcorde, ancien ambassadeur belge en Suède, Pologne et au Canada. « Contrairement à la monarchie britannique ou aux royautés scandinaves, la dynastie belge facilite les rencontres, tisse des liens dans les milieux d’affaires, et insuffle un certain soft power qui renforce l’attractivité du pays et apporte une touche de glamour aux partenaires étrangers.«
Philippe, Roi de Bruxelles ou Roi des Belges ?
Le Roi et la Reine ne participent pas aux négociations en elles-mêmes, mais leur simple présence apporte souvent une forme de crédibilité sur la scène internationale comme nationale. Dans un paysage politique belge, parfois instable, marqué par de célèbres crises et impasses, leur présence rassure. Souvent sans quitter le pays, voire leurs fiefs. Sur les 291 sorties officielles de la famille royale en 2024, seules 18 visites ont été effectuées à l’étranger et les déplacements hors du Palais ou de la résidence principale se font rares.
Le Palais Royal (112) et le Château de Laeken (25), concentrent à eux seuls une part significative des activités. Ce nombre élevé se justifie par la place centrale qu’occupent ces lieux dans le rôle de la monarchie. C’est au Palais que se tiennent les audiences, certaines réceptions et une grande partie des cérémonies protocolaires. Le Château de Laeken sert de résidence privée pour la famille royale, mais il sert aussi de lieu pour accueillir certaines réunions de travail et surtout des réceptions, dans un cadre plus confidentiel ou familial.
Avec 207 audiences, réceptions et visites officielles sur 291, Bruxelles domine largement les lieux d’accueil des événements royaux. Un chiffre qui peut sembler disproportionné par rapport aux autres communes et villes, mais qui s’explique par le fait que la capitale accueille non seulement le Palais et le domicile royal, mais qu’elle est également le siège de nombreuses institutions européennes et belges, ainsi que de nombreuses administrations centrales.
La famille royale incarne l’unité et la stabilité du pays
La politique belge ressort comme l’activité principale de l’agenda de la famille royale en 2024. Dans le contexte d’une année électorale, les nombreuses audiences dédiées aux négociations en vue de former les gouvernements ont particulièrement mobilisé le roi Philippe. Les activités à caractère social arrivent en deuxième position, soutenues par la reine Mathilde pour qui ce domaine reste prioritaire, principalement à travers ses visites de terrain et son soutien aux causes sociétales.
Aujourd’hui encore, la fonction royale reste fidèle à l’esprit de la Constitution de 1831, qui pose une règle fondamentale : le Roi ne peut poser aucun acte sans le contreseing d’un ministre (deuxième signature destinée à authentifier la signature principale). Il demeure officiellement chef de l’État « mais son pouvoir reste avant tout symbolique et représentatif« , rappelle Raoul Delcorde. Il incarne l’unité du pays, nomme les ministres, signe les lois, mais toujours sous l’œil attentif d’un membre du gouvernement. Il n’est pas Roi de Belgique, mais bien Roi des Belges, une subtilité sémantique qui révèle toute la portée de son rôle.