Dix-huit mois après le début du conflit, le Soudan s’enfonce dans le chaos.
Image : MSF 2025
Arrivée de civils déplacés de la ville assiégée d’El-Fasher dans le camp de Tawila Omda, au Nord Darfour, Soudan, 2025
C’est l’une des pires crises humanitaires du XXIe siècle. Voilà comment l’ONU qualifie la situation actuelle au Soudan. Depuis avril 2023, la guerre a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé près de douze millions de personnes.
La prise d’Al-Fashir
Ce 26 octobre 2025, après 18 mois de siège et de politique de famine, la milice RSF (forces de soutien rapide) a pris le contrôle d’Al-Fashir, le dernier bastion de l’armée régulière soudanaise au Darfour. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) plus de 33 000 personnes ont fui Al-Fashir en seulement trois jours.
Les habitants déplacés racontent des scènes de terreur : exécutions sommaires, viols, pillages, enlèvements, et même des attaques visant les travailleurs humanitaires. Des analyses d’images satellites menées par le laboratoire de l’université Yale confirment ces accusations : elles révèlent des “activités d’élimination des corps” à Al-Fashir, ainsi que des zones pouvant correspondre à des fosses communes.
L’organisation humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF), présente autour d’Al-Fashir et ses localités, confirme de telles exactions. Julien Binet, coordinateur des opérations de MSF au Soudan, identifie plusieurs besoins prioritaires, dans un contexte où l’action humanitaire demeure fortement restreinte et entravée par le conflit armé. “Le plus urgent est la protection des civils (…) et tout ce qui est lié à la malnutrition. Toute cette population fuit, vit dans la brousse et dépend de l’aide humanitaire pour survivre, or la plupart des humanitaires ne peuvent pas travailler convenablement à cause de la situation sécuritaire”.
De potentiels crimes de guerre et de crimes contre l’humanité
Ce lundi 3 novembre, la Cour pénale internationale a tranché. Ce qui se passe à Al-Fashir constitue potentiellement des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
Julien Binet donne l’exemple de bombardements d’hôpitaux, tels que celui de Kornoi, dans le Darfour occidental, le 3 novembre dernier. Face à l’afflux de déplacés, MSF avait choisi cet hôpital, notamment pour fournir des soins et médicaments aux habitants de la région. Mais l’hôpital a été détruit.
Entre 70% et 80% des hôpitaux dans les zones touchées par le conflit depuis 2023 ne sont plus opérationnels, selon l’ONU.
Dans certains hôpitaux, des massacres ont eu lieu. Ce fut le cas quelques jours à peine après la prise d’Al-Fashir. L’OMS a fait état d’un massacre de plus de 460 personnes au sein de la maternité de la ville.
Des violences « ethniques »
Dès juin 2023, le Secrétaire général de l’ONU António Guterres alertait sur la “dimension ethnique” des violences au Soudan.
Des ONG, comme Amnesty International ont rassemblé des preuves de ces crimes commis aussi bien par l’armée régulière que par les RSF, notamment l’assassinat organisé de certaines communautés, comme les Massalit, une communauté non-arabe du Darfour occidental.
Une trêve fragile
Les FSR ont annoncé le 6 novembre 2025 accepter la trêve humanitaire proposée par les États-Unis, l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Celle-ci a été immédiatement rejetée par l’armée soudanaise. Son chef, le général Al-Burhan, affirme vouloir continuer la guerre jusqu’à la victoire.
Pour tout comprendre du conflit au Soudan, regardez notre vidéo explainer ci-dessous.

