"À la maison"

Quand l'espoir renaît au centre Fedasil à Spa

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Crédit Photo : Louise Joenen

Quand l’espoir renaît au centre Fedasil à Spa

Crédit Photo : Louise Joenen

Chaque année, des dizaines de milliers de personnes demandent l’asile en Belgique. Nombreux passent d’abord par le centre d’observation du Petit Château à Bruxelles, un lieu où les évaluations sociales et médicales prennent place, et où la question du droit à l’accueil est tranchée. Mais ce n’est qu’une première étape. Les plus chanceux sont transférés au centre Fedasil à Spa, un ancien hôtel transformé en refuge pour ceux qui ont tout perdu.

Loin de l’agitation des grandes villes, ce centre isolé dans la nature offre une ambiance calme et paisible. Accueillant près de 450 demandeurs de protection internationale, il est un havre pour les familles, en particulier celles avec de jeunes enfants. Les murs blancs résonnent de leurs pas, les couloirs sont envahis de poussettes et de vélos, des symboles de la vie familiale qui reprend peu à peu ses droits.

Chaque jour raconte une nouvelle histoire, tissée entre les résidents, les travailleurs et les bénévoles. Dans ce lieu d’accueil, la solidarité se manifeste à chaque instant. Les familles Albayouk, Abdurrahman et Alameer ont noué des liens forts, leur permettant de tout doucement appeler ces murs blancs “maison”, et de considérer leurs voisins comme des membres de leur famille.

“Quand on a dû fuir notre pays, on a rien pu emmener avec nous. C’était la guerre.”

Awada, 17 ans, a dû fuir le Yémen avec sa famille il y a plusieurs années, accompagnée de sa mère, ses trois soeurs et ses deux frères. Leur périple a été long avant de finalement arriver en Belgique, il y a un an et huit mois.

Awada, elle, a la bougeotte. Elle ne manque aucune activité et passe ses journées à courir d’un bâtiment à un autre pour papoter avec les travailleurs et les bénévoles. Elle connait le centre et ses environs comme sa poche. C’est à l’intérieur de ces murs blancs qu’elle se sent à la maison.

A l’intérieur de la chambre familiale, Rina et ses sœurs s’occupent constamment du petit Zayn. Il n’est pas à l’aise dans l’appartement de sa maman Needa, il ne fait que pleurer. Elles s’occupent de le nourrir, de lui changer la couche ou encore de l’endormir. Rina se demande comment il va faire quand elles ne seront plus là.

Zayn a 6 mois. Il est né ici, en Belgique. C’est un peu le bébé de tout le monde au centre. Sa maman, Needa, fait entièrement confiance aux voisins.

En Palestine, Needa était une grande cheffe. Au centre, ce n’est pas le manque de matériel qui l’empêche de préparer de bon petits plats à tous ceux qu’elle aime. Mohanad lui, a trouvé du travail à Anvers, où il prépares des kebabs. Cela lui a couté une blessure à la main, mais c’est chaque weekend le sourire aux lèvres qu’il repart à son travail.

Cela fait 10 ans que Needa et Mohanad sont mariés. Leur amour est flamboyant. En Palestine, il est courant pour un homme d’avoir plusieurs femmes. “S’il osait aller voir ailleurs, je le tuerait.” confie Needa.

“Tout le monde l’appelle bébé qui pue parce qu’il a tout le temps du vomi sur lui” raconte Adwaa en riant.
Assise sur un banc dans la cour du centre, Needa se perd dans ses photos de famille. Elle a dû laisser ses enfants là-bas, avec leur grand-mère. La plupart de ses frères, sœurs, nièces et neveux sont morts suite aux nombreux bombardements qui ont touché le pays. Sa famille lui manque énormément.
Cela fait un an que les familles Abdurrahman et Alameer sont voisins au centre. Une année rythmée par une nouvelle naissance qui a beaucoup rapproché les deux familles.

“Tu viendras nous voir dans la nouvelle maison ?” murmure la petite Adwaa.

“Madame Sophie je l’adore, et sa fille c’est ma meilleure copine, on joue souvent ensemble” Awada, 17 ans, dans le bureau de Madame Sophie.

“Tu viendras nous voir dans la nouvelle maison ?” murmure la petite Adwaa.
La chambre des Yéménites est toujours bien animée. Du matin au soir, entre les copains des enfants, les parents du petit Zayn et les bénévoles, il y a du passage.

Lorsqu’il est l’heure du repas, tout le monde doit prendre son badge pour aller à la cantine. Cela permet de vérifier que tout le monde est au centre et que personne ne part travailler en “cachette”. Lorsqu’un adulte trouve un travail, il doit donner une compensation au centre.

“Comme on a beaucoup d’espaces verts, on a beaucoup de familles avec des enfants qui viennent ici.” Pierre-Yves, travailleur au centre Fédasil.

Juste devant l’accueil se trouve un grand terrain de basketball. Les filles s’arrangent toujours pour être avec monsieur Antonin, un travailleur, pour augmenter leurs chances de gagner.

Khadra et Ilham ont 15 ans. Elles se sont rencontrées au centre il y a un an et quatre mois et depuis, elles ne se lâchent plus.

Ce mercredi après-midi a eu lieu une séance d’information aux droits des jeunes. Sophie et Catherine sont venues apprendre aux filles les différents droits qu’elles possédaient en tant que mineures, et un atelier de dessin s’en est suivi. Awada, elle adore apprendre. Plus tard, elle aimerait devenir professeure de français.

Des cuisines sont à disposition sur réservation. Cela permet à chacun de cuisiner librement dans un espace plus spacieux que les dortoirs. Souvent, les gens ne respectent pas ces horaires et Awada doit attendre longtemps avant de commencer à cuire, mais cela ne l’embête pas.
C’est rare qu’il fasse beau, alors quand le soleil pointe le bout de son nez, tout le monde en profite pour faire sécher son linge sur la haie.
Dans deux semaines, Awada et sa famille s’en vont. Ils ont trouvé une maison à Spa, ça veut dire qu’elle pourra toujours venir rendre visite à ses amis et aux travailleurs. C’est ça qui lui manquera le plus ici. Dans le hall d’entrée, ses pleurs se font entendre.
Faten, arrivée au centre avec ses trois enfants il y a deux semaines, s’autoproclame maman de tout le monde. Quand elle voit que quelqu’un est seul au centre, elle l’accueille toujours à sa table. “If you are alone, no problem ! I say come to mama!” crie-t-elle le sourire aux lèvres. Cette mentalité lui a permis de se rapprocher de beaucoup de personnes en très peu de temps.
Ahmad, 30 ans, se sent bien ici. Cela n’a pas toujours été le cas. Après avoir quitté la Syrie il y a quelques années, il a vécu en Roumanie avant d’arriver en Belgique. Il lui a ensuite fallu vivre plusieurs mois à la rue avant d’être accepté dans le centre. Il fait partie des “enfants recueillis” de Faten, avec qui il partage de nombreuses chichas sur sa terrasse. Il adore passer du temps avec Nutella, la plus jeune fille.
Faten et ses enfants, palestiniens ayant vécu toute leur vie à Dubaï, sont arrivés il y a deux semaines. Ce jour là elle célébrait les 16 ans de sa fille Retal. “C’est ennuyant de rester dans sa chambre, il faut profiter de l’extérieur et des espaces qui sont à disposition, c’est pour ça qu’on a demandé à organiser une fête ici” raconte-elle en découpant le gâteau.

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