A l’occasion du 8 mars, les étudiants de la section Presse-info ont eu l’opportunité d’échanger avec Safia Kessas, journaliste et réalisatrice. Sous les lumières de la cafétaria de l’IHECS, la journaliste a répondu aux questions préparées par les étudiants de bac3 autour de la condition des femmes dans l’univers des médias. Parole franche d’une femme des médias.
Texte et images : Delphine Grote et Loriana Candela
La rencontre, orchestrée par Nordine Nabili, président de la section Presse et Information à l’IHECS, a gravité autour de différents thèmes, dont Safia Kessas a la charge au sein de la RTBF. Elle a évoqué quelques affaires pour illustrer son propos : depuis la révélation d’abus et la prise de parole facilitée des victimes au sein du média, une cellule d’aide psychologique et juridique a été mise en place. Ce dispositif a permis à la RTBF de prendre conscience des discriminations subies par ses employées et de leur apporter son soutien. Créée à la suite des propos racistes à l’encontre de Cécile Djunga, présentatrice Météo, cette structure constitue un premier pas vers la reconnaissance des employées et l’amélioration de leurs conditions de travail.
Ces affaires internes à la RTBF ne sont malheureusement qu’un reflet de ce qui traverse la société au quotidien. Dans les rédactions comme dans la vie, les femmes subissent le poids de la hiérarchie sociale. Cette pyramide archaïque mérite d’être revisitée, pour offrir aux femmes la place qu’elles méritent, dans la société comme dans les médias.
Aujourd’hui encore, une attitude type est attendue pour les hommes aussi bien que pour les femmes. Selon Safia Kessas, c’est là que se trouve le nœud du problème. Les rédactions demandent à leurs employées d’être douces, calmes et obéissantes, à l’image de ce que certaines personnes attendent des femmes en général. À l’inverse, les hommes ont plus souvent des postes à responsabilité qui requièrent apparemment de la virilité. Et ces stéréotypes sont le fruit de l’éducation, qui ne cesse d’inculquer aux enfants les mêmes schémas primitifs. Or, comme l’affirme Safia Kessas, les médias ont un rôle d’exemplarité. C’est donc à eux de changer pour insuffler le renouveau dans notre société.
Ces hashtags qui ont changé la donne
De plus en plus répandus sur nos réseaux sociaux, il est impossible de manquer les mouvements lancés par les #MeToo ou encore #BalanceTonPorc. Pour notre invitée, ces élans de dénonciation sont très bénéfiques, à condition d’en vérifier les sources avec soin. Le cyberharcèlement des femmes journalistes est un problème encore très actuel, malgré les dispositifs mis en place pour contrer ce fléau.
L’autre sujet développé par Safia Kessas concerne l’autocensure des femmes. À cause de cette crainte permanente de voir leur image dégradée à la suite de la diffusion de leur travail, une forme d’autocensure se développe chez les femmes dans le milieu journalistique. Il est d’ailleurs parfois difficile pour elles de trouver leur place dans ce monde dont les principales fonctions de direction sont occupées par des hommes.
C’est dans l’optique d’éveiller les esprits à la cause féminine que Safia Kessas a créé en 2019 Les Grenades. Dans le prolongement de sa mission à la RTBF, ce nouveau média décrypte l’actualité avec un point de vue féministe dont la société a grandement besoin.
Enfin, la rencontre avec Safia Kessas aura permis aux étudiants de prendre conscience de la réalité vécue par les femmes dans les médias, les enjeux de leur situation ainsi que les solutions mises en place pour leur venir en aide. Une façon très concrète d’ouvrir les esprits, en cette journée du 8 mars.
Delphine Grote et Loriana Candela (bac3)