Poseidon, igloo familial

Gérée de père en fils depuis trois générations, Ice Skating Poseidon, permet, depuis 1966, la glisse des petits et grands, d’octobre à avril. Désormais seule patinoire de Bruxelles, elle est une gérée par une famille de passionnés. Mammouth a chaussé ses patins et est allé à la rencontre des esquimaux Van Audenhaege.

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Photo : Luna de Wilde

Gérée de père en fils depuis trois générations, Ice Skating Poseidon, permet, depuis 1966, la glisse des petits et grands, d’octobre à avril. Désormais seule patinoire de Bruxelles, elle est une gérée par une famille de passionnés. Mammouth a chaussé ses patins et est allé à la rencontre des esquimaux Van Audenhaege.

Photo : Luna de Wilde

Dix degrés à l’entrée, deux à l’intérieur ; le contraste se fait ressentir. Une grosse machine perdue dans la brume et de la musique hip-hop nous accueillent. Il est temps de refaire la glace.

La patinoire a été créée à l’initiative de Léon Van Audenhaege. Elle a rouvert en octobre, après une saison off, pour cause de crise sanitaire. Nous allons aujourd’hui rencontrer son fils, Luk, 71 ans, est son petit-fils, Glenn, 39 ans, actuel gestionnaire de ce bijou familial. « Plus qu’à plein temps ! » rit-il, « et sans jamais patiner ». Ses sœurs Carol et Jessie, patineuses quant à elles, enseignent leur sport favori.

Pour rejoindre le bureau de Glenn, il nous faut traverser les espaces de location de patins, et enjamber Taco, le labrador, qui paresse au chaud. C’est là que les deux hommes reviennent sur l’histoire des lieux.

Léon Van Audenhaege, en tant qu’échevin des sports de Woluwe-Saint-Lambert en 1958, voulait doter Bruxelles d’un espace dédié au patin glace, sport à la mode dans les années 50. En effet, depuis 1952, date à laquelle la patinoire rue Fossé aux Loups a faire fondre sa glace, il n’était plus possible de patiner dans la capitale. Il fallait se rendre au Palais des Sports de Liège ou d’Anvers. Faute de budget communal, c’est en tant qu’affaire privée que la patinoire fut construite. 

La guerre des toits 

Le business familial se trouve concurrencé dès l’ouverture de la nouvelle patinoire de Forest National, dans les années 70. En effet, celle de Woluwe n’avait pas de toit et « il pleut de temps en temps en Belgique parait-il », plaisante Luk. Cela lui a couté la perte de nombreux membres dont principalement les patineurs professionnels qui devaient s’entrainer tous les jours et ce, à l’abri des intempéries. C’est la raison pour laquelle en 1980, la glace s’est vue recouverte d’une toiture mobile, unique en Belgique. Des journées sans aucun patineur en raison de la météo belge n’étaient plus possibles. Sans ce toit, Ice Skating Poseidon n’existerait plus depuis un bon bout de temps. 

Au Poseidon, profitons !

La famille originaire de Woluwe a toujours adoré organiser plein d’évènements sur glace. Au début, il y avait un club de hockey, du patinage artistique et du patinage de vitesse. On y retrouvait plus de professionnels que d’amateurs. Aujourd’hui, c’est une toute autre dynamique. La patinoire est un lieu de loisirs où une soirée disco se tient tous les vendredis. Il y a vingt ans, il était même possible de faire du « karting sur glace ». La patinoire vit aussi au rythme des fêtes, avec des araignées géantes au plafond pour Halloween, ou des guirlandes et sapins pour Noël.

N’étant pas rentable pour un complexe privé, plus aucune compétition n’y est organisée. Pourtant, celles-ci ont permis à Luk de rencontrer son épouse. Ancienne championne de Belgique de patinage artistique, Monique Cauberghs connait bien la glace du Poseidon. À l’âge de 16 ans, elle s’entraine, donne des cours et rencontre Luk qui y travaille en tant qu’étudiant. Trois enfants plus tard, Monique et Luk sont toujours ensemble. Bien qu’il s’agisse d’une patinoire familiale, Glenn et son père n’ont pas la glisse dans le sang. Un peu de hockey sur glace de temps en temps, éventuellement. Ils partagent ce non-amour du patin, mais pas le même meilleur souvenir : l’inauguration de la toiture pour l’un, la première soirée mousse sur glace pour l’autre.

Mesures sanitaires : une nouvelle fermeture serait une catastrophe

Quant au Covid, il n’a pas épargné l’entreprise des Van Audenhaege. Après avoir ouvert deux jours et une soirée la saison dernière, de nombreuses adaptations ont dû être mises en place : un système de réservation en ligne, des séances de deux heures maximum, du nettoyage renforcé… Le plus gros souci pour les business privés semblerait être les décisions ministérielles prises à la dernière minute qui entravent leur organisation et leur font perdre de l’argent. En effet, les horaires de cours des différents professeurs présents ont également été impactés. Carol n’a jamais eu aussi peu d’élèves depuis sa première année de travail. La moitié n’a pas repris contact, alors qu’il s’agissait d’élèves réguliers. 

Après une saison sans patins, il serait donc extrêmement difficile pour cette famille de refermer à nouveau. Un hiver sans ouvrir est déjà de trop. Aucun événement privé ne peut avoir lieu, donc ils ne peuvent compter que sur les revenus générés par la vente d’entrées, de location et de la cafétéria. Heureusement la saison 2020-2021 a pu être sauvée grâce à l’argent mis de côté depuis plus de 50 ans et presque seulement grâce à celui-ci. Peu de subsides les ont aidé à sortir la tête de la glace.

Après de longues heures de travail pour mettre en place la réouverture et s’adapter aux normes sanitaires (changeantes), la famille espère désormais pouvoir garder sa patinoire ouverte jusqu’à la fin de la saison et continuer encore au moins 50 ans car, pour le public, « ce n’est que du bonheur ! ». Parole de patineurs. 

Luk et son fils Glenn, gérant de la patinoire
Luk a cédé sa place à son fils Glenn, nouveau gérant de l’affaire familial depuis 15 ans.
Un patineur freinant avec ses patins de hockey
Bien qu’il n’y ait plus de club de hockey, de nombreuses personnes utilisent des patins de hockey afin de réaliser des virages très serrés et parfois, du freestyle.
La machine, lissant la glace
La machine passe régulièrement pendant la journée afin de lisser la glace et enlever tous les résidus crées par les patineurs.
La cafétéria avec une vue sur la patinoire
La cafétéria offre différentes formules, dont une formule anniversaire.
Vitrine avec les différentes sortes de patins, soit pour l'artistique, soit pour le hockey
Même s’il n’est plus possible d’intégrer un club de patinage artistique ou de hockey, il est possible d’acheter des patins « pros ».
La location de patins est décorée sous le thème d'Halloween.
Chaque vendredi soir une soirée disco a lieu, sauf le vendredi 29 octobre où Halloween sera à l’honneur.
Carol, soeur de Glenn, est en train de donner cours de patinage artistique
Carol passe ses soirées à donner cours à la patinoire, après avoir passé ses journées à donner cours de maths et de français.
Preuve que les mesures Covid sont mises en place à la patinoire
Bien qu’il ne faille pas porter de masque sur la glace, il reste obligatoire dans l’enceinte de la patinoire dès 12 ans.
Entrée de la patinoire Poseidon
Le Covid Safe Ticket est désormais demandé à l’entrée.

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